La cuisine créole

J'avais rendez-vous avec des amis au restaurant "Le RAOU" à St FRançois.Quand on veut déjeuner en savourant une excellente cuisine créole , c'est une adresse à retenir
Simple case , recouverte de tole ondulée;voilà pour le décor .
Maman est au fourneau et les garçons au service...il ne nous reste qu'à déguster :poissons grillés , lambis ( la sauce semble etre un sabayon aux épices...) chatrous ou pieuvre , accompagné de riz blanc ou mélangé avec des pois rouges...
Alors que j'attendais les amis ,j'admirais le travail de tressage des palmes de cocotiers,cette meme façon de créer les fameuses corbeilles ;elles sont vertes quand on les achète (1/2 bleu cobalt + 1/2 jaune de cadmium clair exactement ). Et puis elles sèchent et prennent la couleur des feuilles d'automne.Ils le font si bien ici qu'il faut leur laisser ce savoir faire;car sinon ,que ramener dans ses bagages , pour moi , c'est le meilleur souvenir et j'ai mon façonneur attitré. C'est un rasta de la Pointe,il vend ses corbeilles sur le trottoir et me connait à présent.Il y a un tel échange respectueux entre nous ,qu'il n'oublie jamais de me faire un ou deux colibris avec ses chutes de palmes :j'ai une belle collection de colibris secs ;les plus anciens ont bien 25 ans...Ils m'ont d'ailleurs servis de modèle pour la toile "Anna et les ziozios du Rasta ".

Pour une toile...

Je dédie ce petit blog à Ana car je sais qu'elle me lit régulièrement !
Tout à l'heure,tu es passée à l'atelier et j'ai oublié de te raconter ma petite escapade à Pointe-à-Pitre :(à La Pointe ,comme on dit ici...)
Je dois faire un tableau avec des dimensions spécifiques;je suis donc allée chercher du lin à PAP. Je me suis rendue à La Darse , tu sais ,ce fameux quai qui prolonge la Place de la Victoire avec,à droite le marché et à gauche le bazar de tissu (on dit ici,le marchand de toile...)
Je me laisse "engloutir" par les rouleaux de tissu;on dirait vraiment un labyrinthe avec le coin des madras, celui des soieries,celui des tulles,celui des toiles à matelas etc...etc...
Je m'approche d'un monsieur qui range les tissus et je lui demande où se trouve le lin. Il m'y conduit et je choisis le blanc. "je voudrais 1 m ,lui dis-je "
Il prend alors le bout du rouleau,ouvre ses bras en croix avec le tissu tendu;alors que je le regarde en riant,il me coince le plus sérieusement du monde le tissu entre le pouce et l'index,fait un plis et rejoint l'autre lé ,prend sa paire de ciseaux et ...tchac...tchac...tchac,me coupe le tissu: je n'ose meme plus rire mais je jette quand meme un coup d'oeil à la charmante petite vendeuse ,assise à coté ,toute souriante ma foi ;je réalise alors que c'est l'habitude de la maison !
Je paie et je m'en vais !
Ce n'est que dans la nuit ,que j'ai été prise d'un fou rire en y pensant . Et , devine ce que j'ai fait à mon réveil ?
Je suis allée mesurer mon coupon : ...1m30 !!!
Si j'avais un impresario de ce genre , je ferais des affaires .
Je ne pouvais pas ne pas raconter cette charmante histoire.
A la prochaine escapade à La Pointe ,je t'amène avec moi !

Bordeaux la scintillante

Bordeaux , la Favorite

Ravalement ,toilette,lifting... on en vient à employer des termes de plus en plus humains pour parler de Bordeaux ; comme si , au gré des chantiers de restauration des quais , on découvrait la beauté d'une femme...
Et j'ai eu envie de parler d'elle comme d'une "Favorite" tellement que ,une fois blanchie , parée et illuminée , elle apparait comme une souveraine !
J'ai eu le plaisir de passer toute une soirée face à l'architecte des Batiments de France,initiateur du réveil du vieux Bordeaux.C'est lui qui a su montrer que ,derrière ces façades noircies par les ans,vouées aux gémonies,se cachaient des splendeurs :comme un dépliant , sur plus de 300 mètres , ces façades se répètent . Avec aujourd'hui LA BOURSE se reflétant sur le plan d'eau , il nous vient à rever à Venise,à St Pétersbourg,bref à ces temps lointains des reines et des impératrices...

Le jour où une amie bordelaise a désiré que je lui façonne une poterie , je l'ai appelée " la Favorite " et , depuis , sont nées la n° 1 , 2 , 3 etc.;toutes différentes et parées de colliers inspirés de mes cueillettes . La 1ère ,portant un collier fait de marrons,ramassés un jour d'automne à Margaux ! Ce sera "la Marronne ",clin d'oeil au terme qu'on donnait aux esclaves qui s'enfuyaient. Celle qui sèche en ce moment , aura un collier de coquilles de moules , ramassées à Pont Roux au Yaudet:coquilles roulées et battues par les vagues , sèchées,burinées sur la grève , dans un camaieu de bleus que , seul le doux soleil breton peut inventer..indigo , une pointe d'outremer,un dégradé de gris : cette Favorite n° 3 trouvera sa place un jour en Bretagne.
Avant cette collection de Favorites , j'avais créé "les Courtisanes":toute une série de femmes - poterie qui semblaient comploter entre elles.J'avais utilisé ce terme en pensant aux femmes qui accompagnaient une grande dame ayant passé un moment dans mon atelier.Cette femme , mondialement connue ,semblait prisonnière de sa garde rapprochée . Je crois qu'elle avait aimé ma façon naturelle et ma liberté car elle m'avait dit en aparté ;" restez toujours comme vous etes !"
C'est en pensant à elle que sont nées mes "Courtisanes " et mes "Favorites ": elle pourrait etre la fée de mon oeuvre.
Et voilà comment on passe de Bordeaux aux fées..."Fééries bordelaises"

une petite histoire dans la Grande...

hier dimanche,se trouvaient à ma table des amis de Basse-Terre .
Katy étant hongroise,je lui ai parlé du 50ème anniversaire de l'insurrection du peuple hongrois pour la libéralisation du régime:avait-elle un souvenir particuliers,
"J'étais dans ma chambre et je m'exerçais au violon,quand mon père est entré,m'a demandé de poser l'instrument et de descendre dans la rue car,m'a -t-il dit,c'était la Révolution...
Je me suis donc retrouvée dans la foule,j'avais 12 ans ..
On m'a dit de rentrer chez moi car j'étais trop jeune et il pouvait y avoir des tirs dans la rue.
Je suis donc rentrée !
Quelques jours plus tard,alors que je dormais d'un profond sommeil,j'ai entendu un bruit que je n'oublierai JAMAIS:le bruit des chars sur le pont...(je n'ai pas compris le nom car elle l'a désigné avec son accent hongrois ).Je n'avais jamais entendu ce bruit,mais j'ai su tout de suite que c'était les chars.
Mon grand frère, alors agé de 18 ans,fréquentait une jeune juive qui n'allait pas tarder à fuir avec sa famille.
Au moment du départ,elle a voulu revoir mon frère;je l'ai suivi à son dernier rendez-vous ,je l'ai vu donner un baiser furtif sur la joue de son amoureuse...
Longtemps,il m'a reproché de l'avoir suivi et donc de lui avoir volé un moment d'intimité..."
Elle m'a parlé de la haine des Hongrois à ce moment-là vis -à-vis de la France qui n'avait pas bougé.
Elle m'a parlé du communisme qui, en ce temps-là , faisait déjà de la discrimination positive à l'égard du peuple tzigane.Depuis lors,biensur,on connait leur réussite dans la musique;de toute façon ils n'avaient pas besoin d'etre poussés,ils étaient déjà les meilleurs,mais il avaient surtout besoin d'etre encadrés.J'ai appris aussi , qu'en cuisine,ils étaient très forts et qu'en Hongrie,il y a beaucoup de Chefs tziganes.
Puis ,le communisme a doucement réhabilité leur anciens gouvernants et c'est ainsi que son père,diplomate ,après avoir connu les geoles staliniennes (pour un soi-disant espionnage auprès du Vatican!!!) a eu le droit de retravailler.
A 18 ans,Katy a donc pu avoir un passeport et ,étant la fille chérie de son père,a pu partir en France(il lui a dit ,en partant, avec amour:"nous ne t'en voudrons pas si tu ne reviens pas !" ) dans le cadre d'un jumelage entre musiciens:elle faisait alors des études musicales.
Et puis,Katy a fait sciences po ;et puis a enseigné et puis se consacre à présent à la culture d'orchidées!
Je trouve très intéressant de connaitre des histoires vécues donc vues sous un autre angle que celui qu'on nous apprend en classe...
J'ai , bien sur , demandé à Katy si je pouvais relater ses confidences et elle m'a répondu oui .
Personnellement ,j'avais 8 ans quand les chars russes sont rentrés à Budapest et j'entends encore mes parents en parler;pour une fillette,je sentais qu'il se passait quelque chose de grave.
On se souvient clairement de certains détails de l'histoire;2 exemples m'ont encore frappée:les rappatriés d'Algérie et la mort de Kennedy...
C'était la conversation d'un dimanche sous les tropiques autour d'un délicieux colombo...
Je voulais aussi dire combien j'avais apprécié l'exposition de Brigitte Ballandreau à St François:un travail artisanal très fort;c'est la 1ère fois que je vois un travail aussi recherché.:bravo !

Annaick

Cette terre cuite, haute de 100cms, file des jours heureux, face au petit port de Ploumanach : pour moi,ce coin de Bretagne est un pur joyaux de ce qu' a pu réaliser l'homme en communion avec la nature...

Cette Bigouden,prete pour le "jabadaou" a une petite histoire:je me trouvais chez l'imprimeur à Paris pour en faire une affiche,lorsque ,face à cette photo,le patron s'arreta longuement .
"Voyez,vous etes face à une petite bigouden noire!"lui dis-je
"ça ne doit pas exister beaucoup !" ,me répondit-il
"La preuve que si !je l'ai inventée!"
Et pourtant,cet imprimeur en voit de toutes les couleurs...Il est le favori de la Maison des artistes à Paris et ,chez lui,j'ai fait la connaissance d'un artiste chinois ,très en vue dans son pays car choisi pour venir travailler quelques mois en tant que résident dans cette prestigieuse maison...

Dimanche sous les tropiques

nous avons passé des moments très riches avec nos amis des Saintes:Raymond Joyeux,poète notoire avec qui nous échangeons nos idées au sujet des bouquins :hier,on a parlé de "Mao"de J Chang et J. Halliday,énorme pavé que j'ai entamé et que j'ai d'ailleurs offert à un ami breton;et puis "Marilyn,dernière séance"de M Schneider que m'a offert une élève...Il m'a fait connaitre la toute nouvelle revue "Philosophie" . (J'ai quand meme appris qui était Averroès dont on parle tellement en ce moment:c'était un philosophe arabe du 12ème siècle .Son interprétation de la métaphysique d'Aristote à la lumière du Coran a influencé les pensées chrétienne et juive du Moyen Age.Il a été également médecin et juriste...cf le Petit Larousse..) Je crois que je parlerai beaucoup de livres dans mon blog car c'est ma 2ème passion avec la musique et bien sur ,la Peinture.
Je leur ai conseillé de lire "Bord de canal"de Alfred Alexandre,jeune philosophe martiniquais.Le sujet évoque la misère des gens laissés sur le coté de la route,rejets de notre société..c'est au coin de la rue ,il ne faut pas se leurrer...
J'ai continué un tableau commencé en juillet:très classique dans le fond et très contemporain dans la forme...bizarre,bizarre..Je crois que je vais y mettre du temps mais il sera très fort..
En novembre,va paraitre dans le magazine"Amina",mensuel traitant des femmes africaines,antillaise et européennes,un beau reportage sur mon travail!
Quelle plume que ce journaliste qu'est Jean Jacques Seymour qui,après avoir fait la une des télés dans les années 80 est passé dans la presse métropolitaine avec son style direct et très fort!
Il a le courage d'inclure dans la créolité,des gens comme moi,venus des ailleurs qui justement font le "meltingpot",fondements meme de la culture créole !
Je vous livre ses premiers mots:
"La créolité a ceci d'extraordinaire qu'elle s'enrichit de tous les apports exogènes.L'art n'échappe pas à ce domaine.Annie Ranguin,fondatrice et animatrice de l'atelier"Ti-Factory" à St François ,en Guadeloupe,n'a pas fini de nous etonner.Et ce peintre de l'Outremer sait de quoi elle parle..."
Pour la suite,il faudra acheter "Amina"!

retour aux Antilles

L'atelier est fin pret pour recevoir les élèves!
Ce matin,j'ai taillé la haie du jardin;c'est fou comme les plantes ont poussé:c'est magnifique:les papyrus,les alpinias et surtout les bananiers.Il y a meme un beau régime que je partagerai avec les élèves.
Par contre,la petite barrière en bois n'est plus...La copropriété l'a remplaçée par un portail en fer forgé,qui claque en se fermant !Le jardin est clos à présent,enfin,pour moi il est devenu carcéral...
J'ai eu la visite de Leuleu! Que je vous explique ce chien ..
C'est le chien de la Marina,bien portant car nourri par les restaurants du coin,style "La belle et le clochard".Leuleu court toute la nuit dans la marina et,quand j'ouvre l'atelier le matin,il vient dormir dans la clim sur les pieds de mes élèves... .
Leuleu adore les touristes et n'aime que les touristes ,j'ai remarqué qu'il adore les très jolies femmes :si bien que chaque semaine,il suit une touriste (toujours la plus snob ) et la colle durant tout son séjour;et là ,on n'existe plus...A tel point qu'une femme un jour m'a demandé de le tenir,le temps qu'elle s'en aille car sinon ,Leuleu ne la lachait pas.
C'est un peu à cause de lui qu'on a changé le portail!Et Leuleu est toujours là.
Histoire bien ordinaire mais c'est Leuleu qui m'a accueillie après 2 mois d'absence....