

Il est vingt heures et la nuit est noire .
Je suis face à mon mug de « detox tea » et je rêve
Je rêve à mes vacances qui prennent fin
oui , je l’avoue , je n’ai rien fait
Rien
Nothing
Nada
Je n’ai fait que lire et parler avec mes belles-sœurs et goûter leur cuisine indienne
Et j’ai vu les amis de toujours
Tantôt aux Saintes
Tantôt à Pointe-à-Pitre
Et maintenant , je rêve d’ aujourd’hui .. .
Nous étions partis en début de matinée direction : Bouillante
On nous attendait pour midi chez Philippe , le vieux « fwèou « ( frère en créole ) de mon mien :les bancs des jésuites en ont fait des amis à la vie , à la mort !
Quittant la Grande –Terre , nous avons pris la direction du Col des Mamelles : aussitôt , nous voilà « phagocytés« par la forêt tropicale .
Il avait plu , tout était vert ;le long de la route fleurissaient les balisiers tels une haie d’honneur ! on entendait les oiseaux jacasser et s’en donner à cœur joie l
Puis ce fut la descente sur Malendure et Bouillante .
Nous avons grimpé la pente abrupte de « Thomas » le lieu-dit et , sur le plateau , la maison était là dominant la mer des Caraïbes , maison créole , immuable et si attachante ! Josiane nous attendait , comme toujours , et le plaisir de se revoir était intact ;le temps de poser la cocotte–minute dans la cuisine ( de granbonheur , ma belle –sœur s’était mise aux fourneaux pour préparer un colombo de cochon pour Philippe , un plat qu’il adore , surtout préparé à l’ indienne comme seules savent le faire mes belles-sœurs ! Nous avons ainsi traversé toute la Guadeloupe avec cet arôme de curry dans la voiture !!!) et la conversation a repris là où nous l’avions arrêtée il y a dix huit mois .
Le temps d’admirer encore et encore les longues mains de Josiane , je crois que ce sont les plus belles mains que je n’ai jamais vues ; je ne peux m’empêcher d’en parler et je crois que je la complimente à ce sujet à chaque fois que je la vois !
bref , petite parenthèse pour une rareté que j’ai plaisir à signaler .
Le temps donc d’entamer la conversation et arrive le vieux « fwèou « dans sa voiture « Café Chaulet » car il est le gardien du trésor familial : la plantation de café la plus importante de Guadeloupe .
Et Philippe m’apporte dans ses grandes mains , des fleurs de café !
Philippe Chaulet , donc est un personnage de Guadeloupe ; pour moi , il est la Guadeloupe . C’est la seule personne qui sait me parler avec autant d’amour et de conviction de sa terre ; il est sa terre ! Ce serait la seule personne digne de représenter ce pays : Philippe est politicien , président du groupe UMP pour tout dire . Mais Philippe n’est pas une étiquette il en est au-dessus .
Et il a des choses à raconter à son vieil ami , et il parle , alors que Josiane apporte les plats : les éternelles écrevisses de la propriété ,entre autre ,au goût sans nul autre pareil car pêchées dans ses ruisseaux qui dévalent la montagne et cuites au court-bouillon .Petites bananes pour le dessert et café Chaulet , bien entendu .
Entre temps , un Haïtien , un jeune gosse de vingt deux ans , est passé lui dire au revoir ; tout habillé de neuf , style rappeur , casquette à grande visière , grand tee-shirt sur grand bermuda , tennis neufs et tout en blanc, une chaîne et un Christ en argent autour du cou ! Ce jeune garçon part rendre visite à sa « manman « qu’il n’a pas vue depuis six ans , les valises pleines de produits de nécessité comme du « jex-citron « liquide vaisselle par exemple , eh oui ! produits rares là bas à la suite du tremblement de terre .Un enfant livré à lui-même que Philippe a aidé à avoir ses papiers en l’employant sur ses terres , un enfant que Philippe a suivi à tel point que ,pendant le repas , il a téléphoné plusieurs fois à l’aéroport pour savoir si son protégé n’avait pas eu de problème et s’il était bien installé dans l’avion .
Et c’est le premier des trois cas semblables que nous allons découvrir tout au long de cette après –midi .
Nous étions donc au café !
Puis nous nous sommes changés , enfilant un vieux tee-shirt et nous voilà dans la camionnette « Toyota », les trois chiens installés à l’arrière pour une ballade là-haut , très haut dans la montagne dans ses plantations de café , de cacaoyer , au cœur de la bananeraie : le temps de couper un régime de « poyo » ou bananes à cuire pour la belle-sœur et nous voilà de retour , les chiens dissimulés sous les grandes feuilles de bananes qui seraient le régal des cabris , pour une ultime visite dans l’usine de torréfaction située derrière le Musée du Café appartenant à la famille : que ça sentait bon !
Et c’est là que j’ai fait une riche rencontre : une famille d’Indiens Taïnos , la seule de Guadeloupe , tous les autres ayant été décimés au seizième siècle .( On trouve ces populations dans l’île de la Dominique , au large des Saintes où ils vivent encore ) . Philippe en a fait venir un couple , l’a embauché dans sa manufacture de café et …est déjà né un petit indien ;on espère qu’une colonie repeuplera un jour la Guadeloupe .
Moi qui suis très attirée par l’art Taïno , art de cette population , j’ai eu l’impression de me retrouver des siècles en arrière .Je n’ai pas pu m’empêcher de leur demander de poser avec moi , ce qu’ils ont fait sans hésiter . Ce sera la photo vedette du jour !
Et , pour terminer la journée en douceur , la visite de la chocolaterie située derrière la torréfaction avec possibilité de tout goûter !
Voilà pourquoi ,ce soir , je suis devant ma tisane detox !!
Car j’ai goûté : le chocolat à la mangue , celui aux fleur d’hibiscus et tous les autres , et je suis repartie les bras chargés de tablettes pour mes belles-sœurs !
Et cette dernière rencontre , celle de cette jeune femme qui fabrique les chocolats :elle était au RMI ; Philippe l’a embauchée et lui a dit : » fais ce que tu veux « et voilà : elle fait des merveilles !
Philippe est ainsi , philanthrope et tous ses employés l’adorent ; il y a une ambiance de détente et tout le monde travaille consciencieusement à son « poste « .
Il a bien fallu partir car il était presque dix sept heures et la nuit tomberait avant notre arrivée en Grande–Terre .
Il est très tard , la nuit est noire , les grenouilles chantent
Mais je sais que je ne pourrai pas dormir ce soir : j’ai fait trop de belles rencontres !