03 avril 2007

une histoire


L’Inde. Depuis toute petite, je savais qu’un jour je me rendrai dans ce pays mythique, mystique, énigmatique, pays de mes origines, de mon sang, de toutes mes attentes. Je ne savais pas quand ce moment viendrait, je me laissais influencer par les mauvais esprits qui me racontaient la misère, la famine, l’insulte aux yeux européens faite par les lépreux, les morts et la maladie omniprésents ,soi-disant ,dans les rues des villes indiennes.
Et puis, ce moment est venu. Un ami, qui faisait son service militaire au sri Lanka et qui savait Ô combien retrouver mes racines était important pour moi, me proposa de l’accompagner dans son périple en Inde du Sud. Sans réfléchir, j’acceptais. Pourtant, j’étais prévenue, il ne fallait pas m’attendre à dormir dans les palaces aseptisés loin de la foule et de la vie fourmillante des mégalopoles indiennes. Non, si je venais, c’était pour relier 2 villes (Trivandrum et Chennai, nouvelle Madras) sac au dos et nuits chez l’habitant.
Tout ce que je connaissais de l’Inde, c’était les représentations de quelques divinités hindoues, les saris et ces fameux bidonvilles tant décrits par les quelques touristes européens enfermés dans leur car climatisé qui avaient sillonné le pays et me l’avaient raconté.
Aussi, lorsque je posais le pied sur la terre de mes ancêtres, je ne m’attendais pas à un tel bouleversement des sens.
La première chose qui nous surprend, c’est l’odeur. Une merveilleuse odeur d’épices et de fleurs de jasmin qui se dégage de la foule. Des senteurs mélangées mais jamais entêtantes, et puis, aussi et surtout, l’odeur de la terre car, là bas, peu de routes sont goudronnées, la plupart sont de terre rouge ocre, cette terre qui tatoue les pieds nus des hommes en sarong et les saris des femmes portant leurs enfants.
Puis vient le bruit. Non pas assourdissant, comme pourrait le craindre l’étranger devant l’immensité de cette foule, mais un bruit déroutant, le bruit dégagé par les milliers de conversations en hindi, par des camionnettes avec des hauts parleurs sur le toit hurlant leurs discours ( nous l’apprîmes plus tard : des slogans politiques scandés toute la journée car nous étions en pleine période électorale), par les grelots aux chevilles des femmes.
C’est alors que la vue joue son rôle de catalyseur : quel éblouissement ce feu d’artifice de couleurs ! c’est incroyable, on se croit à Bollywood ! Les saris des indiennes sont de toutes les couleurs de l’arc en ciel : du turquoise, du fuschia, de l’orangé, du vert émeraude… que des couleurs flashy, aucune teinte sourde, comme s’il fallait influencer l’humeur par une avalanche de visions positives…
Petit à petit, nous nous laissons submerger par tous les sentiments qui se bousculent en nous et, alors que nous ne comprenons rien à ce nouveau monde, nous nous abandonnons : laissons au temps le soin de nous faire comprendre cette société.
Car cette société est totalement différente de la notre. Ce qu’il faut savoir, c’est que les Hindous (les Indiens de religion Hindoue, religion dominante dans ce sud) passent leur vie à tendre vers le bien afin d’espérer une ré-incarnation plus clémente lors d’une nouvelle vie. Sans cette religion, comment pourraient-ils, d’ailleurs, supporter l’ignominie du système des castes où les Intouchables, véritables fantômes, se comportent telles des ombres. Surtout, ne jamais se faire remarquer lorsque l’on est un intouchable. Cette caste est dévolue aux métiers les plus modestes (pour ne pas dire humiliants) : balayeurs, portiers,… Je me rappelle encore avec émotion de ce portier à qui j’avais décoché mon plus beau sourire alors qu’il m’ouvrait la porte d’un restaurant et de sa gêne lorsqu’il avait baissé les yeux. On m’avait expliqué qu’il ne fallait JAMAIS regarder un Intouchable et que, pour exemple, un balayeur devait toujours balayer en reculant afin d’effacer ses propres pas… Cruel n’est-ce pas ? Et pourtant, tous ces hommes vivent sans jamais se plaindre. Je n’ai pas croisé de mendiant même lorsque mes pas m’avaient menée (sans le vouloir) au beau milieu d’un bidonville. Les femmes les plus pauvres ont les ongles peints, une multitude de bracelets colorés à leur poignet et toujours ces saris dont les nombreux plis leur donnent l’allure de princesses… Quelle féminité !
Non, cette société est déroutante car leurs codes ne sont pas les notres. Leurs tabous ne sont pas les notres. Sur les routes, il n’est pas rare de tomber sur un Indien faisant ses besoins sur le bord de la route, pas de complexe. De même, il arrive que, au détour d’une rue, l’on tombe sur un cadavre jeté dans une charrette en attendant son incinération. Mais, jamais cela n’est choquant car leur attitude est en accord complet avec leur religion, leurs coutumes.
Là-bas, on mange avec la main droite, on marche pieds nus et il arrive que l’on devine les hanches nues d’une femme lorsque tombe un pan de son sari.
Nous avons beaucoup à apprendre du peuple Indien, à commencer par sa sagesse, sa fatalité et, surtout, son espérance. Car, quelque soit l’Indien, qu’il soit brahmane ou Intouchable, tout ce qu’il peut espérer c’est, qu’un jour, ses actes, ses pensées, le conduiront vers une vie future meilleure.

(propos de Bénédicte ,pour faire écho au Salon du Livre de Paris ,sur l'Inde ! avec un peu de retard mais la vie a quelquefois d'autres priorités )
Portrait de famille de "Odile et François" membres de la diaspora indienne de Guadeloupe

2 Comments:

Anonymous Anonyme a dit...

Bonjour,
Je sais que vous avez publié votre article il y a déjà un an mais je viens de tomber dessus en faisant des recherches sur ma famille! Vous avez réalisé un de mes rêves, aller sur le lieu de mes racines : à Madras. Mon arrière arrière Grand-père y a vécu avant de partir (avec apparemment plusieurs escales) en Guadeloupe. Je pense que nous sommes de la même famille vu que vous avez le même nom de famille que ma grand mère ! J'aurais aimé connaitre un peu mieux ma famille et son histoire et vous me donnez l'impression dans connaitre beaucoup. voici mon adresse mail : delphinecomat@yahoo.fr afin qu'on puisse communiquer si vous le souhaitez bien sûr!et m'aider dans la recherche de mes racines.

Delphine comat

30/10/08 11:34  
Blogger Annie Ranguin a dit...

merci ,mademoiselle Ranguin, d'avoir écrit un gentil commentaire .La famille est grande !

6/5/12 03:12  

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